Pourquoi les entrepreneurs coupent la publicité… juste avant que ça marche! Une erreur stratégique trop répandue au Québec

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Le 7 mai 2025
Dans le milieu des affaires québécois, une tendance revient systématiquement, souvent avec des conséquences majeures : des entrepreneurs mettent fin à leurs campagnes publicitaires juste avant que les résultats apparaissent. Ce phénomène est à la fois frustrant, contre-intuitif et malheureusement très courant. Il frappe autant les petites entreprises locales que les PME établies. Et dans la majorité des cas, il s’agit d’une mauvaise lecture du processus marketing, et non d’un véritable problème de performance.
L’entrepreneur, confronté à un ralentissement ou à un doute passager, agit par réflexe défensif. Il coupe ce qu’il perçoit comme une dépense non rentable, sans réaliser que le marketing fonctionne sur une logique d’effet cumulatif. Ce n’est pas au moment où l’on investit que les résultats se présentent, mais souvent bien après. En interrompant cette mécanique trop tôt, l’entreprise efface des semaines d’efforts, de visibilité et de crédibilité. Et surtout, elle redonne involontairement l’avantage à ses concurrents qui, eux, restent visibles.
Selon le Baromètre marketing 2023 de l’AMQ, 61 % des PME qui ont interrompu leur publicité pendant une période de ralentissement ont connu une baisse de revenus durable, de plus de six mois. À l’inverse, celles qui ont maintenu ou ajusté leur stratégie ont enregistré un rebond plus rapide.
La publicité n’est pas un bouton magique. C’est un écosystème. Un terrain fertile qu’il faut arroser régulièrement, même quand les fruits ne sont pas encore mûrs. Dans cet article, nous allons explorer ce réflexe de coupure, comprendre pourquoi il survient, identifier ses conséquences concrètes, puis proposer des pistes simples pour le prévenir. Parce qu’en affaires, la constance est souvent plus payante que la réaction rapide.
Comprendre le mécanisme psychologique derrière la coupure
La décision de couper une campagne marketing ne se prend jamais par simple caprice. Elle survient souvent au pire moment : juste avant que les résultats commencent à se manifester. Ce réflexe est compréhensible, mais il repose sur une mauvaise lecture du cycle naturel du marketing.
Une stratégie publicitaire efficace suit presque toujours la même séquence : sensibilisation, considération, conversion. Cette progression prend du temps. Dans certains cas, il faut plusieurs semaines avant qu’un prospect devienne un client actif. Pourtant, selon une étude Léger réalisée en 2024, 47 % des PME québécoises abandonnent leur campagne après 10 jours, faute de résultats visibles.
Ce comportement s’explique par un décalage entre les attentes de rapidité et la réalité du terrain. La majorité des conversions ne surviennent pas immédiatement, mais après plusieurs expositions au message. Des études nord-américaines montrent que la moyenne est de 18 points de contact avant une décision d’achat.
Ce désengagement rapide est souvent amplifié par des facteurs psychologiques :
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La peur de perdre de l’argent sans garantie de retour
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La pression des liquidités à court terme dans l’entreprise
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L’absence d’indicateurs clairs pour suivre la progression réelle
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L’influence de conseillers ou partenaires externes non spécialisés
Ces éléments créent un climat d’urgence qui pousse à couper, sans analyse. Or, en interrompant une campagne trop tôt, l’entrepreneur sabote les effets cumulatifs déjà amorcés. Il redémarre à zéro chaque fois, ce qui génère de la frustration… et des pertes de revenus.
Pour éviter cela, il faut comprendre que le marketing agit souvent comme une pompe : l’effort soutenu précède toujours le débit constant.
Les conséquences concrètes d’un arrêt prématuré
Quand une entreprise cesse soudainement de faire de la publicité, les impacts sont souvent invisibles au début. C’est justement ce qui rend cette erreur si pernicieuse. Les ventes ne chutent pas immédiatement, mais la visibilité commence à s’effriter, puis la notoriété, puis la confiance. Et au moment où le client est prêt à acheter, l’entreprise n’est plus dans son champ de vision.
Voici les effets observés chez les PME québécoises selon une compilation d’analyses de BDC et de Desjardins (2023) :
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Baisse de trafic sur les sites web de 15 à 35 % en trois semaines
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Réduction du nombre de demandes de soumission ou d’appels de 25 à 50 %
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Hausse du coût d’acquisition lors de la prochaine campagne, jusqu’à 42 %
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Chute du taux de conversion sur les canaux numériques entre 18 et 27 %
En plus des impacts mesurables, il y a des effets moins visibles, mais tout aussi importants :
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L’équipe perd son élan et son enthousiasme autour de la marque
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Les concurrents actifs captent l’attention et renforcent leur crédibilité
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Les clients existants se demandent si l’entreprise est en difficulté
Couper la publicité n’est donc pas une simple pause. C’est un signal envoyé au marché, souvent interprété comme un aveu de faiblesse ou un manque de stabilité.
Comment prévenir cette erreur de jugement
Plutôt que de couper, l’entreprise doit apprendre à ajuster. Il est rare qu’une stratégie marketing n’ait aucun effet. Le plus souvent, les signaux sont mal interprétés ou les attentes sont irréalistes.
Voici quelques stratégies simples pour éviter de tout interrompre au mauvais moment :
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Planifier des campagnes sur une base de 30 à 90 jours, jamais en mode réaction instantanée
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Suivre des indicateurs de progression comme l’augmentation des visites, des engagements, des clics
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Prendre le temps d’expliquer au client que la conversion est souvent indirecte et cumulative
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Comparer les périodes d’investissement avec des périodes sans publicité pour démontrer l’impact réel
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Travailler avec des experts marketing qui comprennent les réalités locales, pas seulement les grandes théories
La clé, c’est d’inscrire la publicité dans une logique de constance, pas d’urgence. Un budget modeste mais maintenu dans le temps est souvent plus efficace qu’un investissement massif sur deux semaines.
La régularité est plus puissante que l’impulsion
En marketing comme en agriculture, ceux qui récoltent sont ceux qui n’arrêtent pas de semer. L’entrepreneur qui comprend que la publicité est un investissement stratégique, et non une dépense optionnelle, prend une longueur d’avance. Il construit une présence stable, une crédibilité durable, et une relation forte avec son marché.
Ce qui freine souvent, ce n’est pas le marché. C’est la peur. Et cette peur peut être neutralisée par des données, de la stratégie et de l’accompagnement. Ceux qui choisissent la constance gagnent toujours sur ceux qui misent sur la panique.
Tendances en ventes et marketing!